Perspectives 2013 – Retour aux actions

Économie
07 janvier 2013
9 min de lecture
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Premières lueurs du nouveau monde et retour aux actions.

L’économie américaine continue d’être sur un courant porteur, qui devrait s’accentuer dans les années à venir. Elle crée des emplois de façon régulière et modérée ; l’immobilier ne s’y dégrade plus, et tend à s’améliorer lentement ; enfin, la très importante décision de Ben Bernanke, président de la Fed, de continuer à soutenir la reprise de l’immobilier par la planche à billet, améliore constamment les conditions de liquidités des banques, et donc le marché immobilier.

Il faut souligner à ce sujet que par sa politique, il semble que Ben Bernanke soit en passe de réussir ce qu’aucun dirigeant de Banque Centrale dans le monde n’a réussi jusqu’à présent : il parvient, grâce à la planche à billet, à mener l’économie américaine proche de son potentiel de croissance optimal, tout en maintenant les taux d’emprunts de l’État américain bas, et sans inflation ! C’est historique, et ce sera une très grande leçon dans l’histoire économique future à répéter longuement aux contempteurs systématiques de la « planche à billet ». Il s’appuie pour cela sur la récession européenne, et la révolution énergétique à venir avec le pétrole et gaz de schiste.

Il n’y a guère plus que les négociations budgétaires américaines, le fameux fiscal cliff, qui fasse peser un risque sur le financement américain et la croissance économique. Si les premières étapes de discussions entre républicains et démocrates ont abouti à un fragile compromis, ces discussions reprennent déjà en vue du relèvement du plafond de la dette et d’accords plus profonds sur le financement du budget de l’État pour fin février. Ces discussions qui, probablement, accoucheront inlassablement d’une souris, se poursuivront sans doute tout au long de l’année. Ce sera un point de vigilance pour nos portefeuilles et ceci explique que nous n’ayons pas complètement soldé nos positions défensives en dollar US.

À l’autre bout de la planète, du côté des pays émergents, d’excellentes nouvelles nous parviennent : la croissance chinoise notamment, qui a ralenti pendant sept trimestres consécutifs, a inversé sa tendance au 4e trimestre 2012. En outre (et c’est une conséquence du risque systémique omniprésent durant la première moitié de l’année 2012), les marchés action notamment asiatiques sont très peu valorisés, avec de solides perspectives de croissance.

En effet, la nomination d’un nouveau gouvernement en Chine, le très faible niveau d’inflation (qui est, rappelons-le, le véritable danger mortel pour ces économies), qui est repassé à 2% en Chine, et les importantes marges budgétaires de l’État chinois, laissent une très importante marge de manœuvre à Xi Jiinping, nouveau président, pour recentrer la croissance de ce pays vers la consommation intérieure (elle croît de 14% sur l’année 2012 !), et pour résorber progressivement les déséquilibres sociaux dans ce pays. Si le potentiel de croissance chinois s’assagit quelques peu autour de 7/8% par an, il est important de remarquer que celle-ci s’assainit également : les exportations vers les USA et l’Europe ne comptent plus que pour 1% de la croissance chinoise, et 65% des exportations chinoises sont à destination des autres pays asiatiques. Autrement dit, le « découplage » de l’économie chinoise, dont plus personne ne veut entendre parler, est plus que jamais à l’œuvre : l’économie chinoise se rend de moins en moins dépendante de la consommation des pays développés. Voici pourquoi nous avons centré sur les pays émergents, et principalement l’Asie, notre réexposition aux actions.

Le Brésil quant à lui, a vu sa croissance baisser fortement sur la même période. Mais là aussi, il semble que l’on soit en fin de cycle baissier : la part des investissements, qui lui font cruellement défaut (là où ils ont été quelques peu trop importants en Chine), devrait augmenter sensiblement dans les mois et années à venir.

Nous continuons donc d’assister à l’entrée dans la consommation de près 40% de la population mondiale, avec le développement de la consommation intérieure des pays émergents – mouvement de fond et véritable révolution économique mondiale, que nous diagnostiquons et suivons depuis début 2008.

 


La révolution du gaz et du pétrole de schiste

Une excellente nouvelle pour la dette américaine et la consommation intérieure des pays émergents

Le problème structurel que pose le développement de ce nouveau foyer de croissance mondial est l’augmentation de la demande de matières premières, qui seront (seraient ?) insuffisantes pour satisfaire les considérables besoins énergétiques et d’infrastructures de ces pays neufs, nouveau cœur de la croissance économique mondiale. La hausse programmée des prix du pétrole notamment risque de mettre à mal la progression de la consommation domestique émergente, en y déclenchant une inflation importée illimitée… Et c’est ici qu’une excellente et surprenante nouvelle nous arrive, avec la découverte du gaz et les huiles de schistes !

Selon un rapport de l’AIE, les USA deviendront autonome d’un point de vue énergétique grâce à la découverte de près de 250 années de consommation de pétrole et de gaz de schiste dans leur sol, et aux réservoirs imperméables de pétrole léger (ou tight oil), qui furent longtemps considérés trop coûteux et trop difficiles à extraire ! Les USA deviendront premier producteur mondial de pétrole, devant l’Arabie Saoudite, entre 2020 et 2030 !

Cette révolution énergétique fondamentale va permettre aux USA de diminuer fortement voire d’inverser le déficit permanent de leur balance commerciales : grâce à l’autonomie énergétique à venir, ils ne seront plus importateurs de pétrole et de gaz – la soutenabilité de leur dette en sera considérablement améliorée.

En outre, la fin de la dépendance américaine au pays arabes producteurs de pétrole aura d’importantes conséquences géopolitiques : signera-t-elle également la fin progressive de l’interventionnisme américain au Moyen Orient ? Ceci ne sera également que favorable à l’évolution de la dette américaine, dont une part très importante provient de leurs interventions militaires ou non dans le reste du monde.

Enfin, une telle évolution à relativement court terme n’invite-t-elle pas les pays arabes producteurs de pétrole à développer d’autres moteurs de croissance que la stricte exploitation de gisements pétroliers ? Par exemple, leur consommation intérieure ? Naturellement. Et le printemps arabe encore en cours marque bien les balbutiements de l’accès chaotique à une certaine autonomie de ces pays.

Mais en outre, c’est une excellente nouvelle pour la Chine et les pays émergents, car ces découvertes invalident le scénario d’une hausse ininterrompue des prix du pétrole du fait de la rareté des réserves. Ainsi, la consommation émergente devrait pouvoir se développer aussi sereinement que possible, pour devenir ce qu’elle est appelée à être (eu égard au taux de croissance important, au très faible endettement, et aux considérables réserves de changes dont disposent ces pays) : à savoir l’un des principaux moteur de la croissance économique mondiale.

Le desserrement de ce frein structurel à la croissance de la consommation domestique des pays émergents, tout comme la faible valorisation des actions de ces pays (principalement en Chine), leur réserve de changes colossales et leur très faible niveau d’endettement, nous ont fait surpondérer les actions (et obligations) de ces zones en profitant ainsi du calme relatif promis sur les marchés par la baisse du risque systémique en Europe.

 

Une situation inédite pour les banques centrales mondiales

La découverte de ces réserves de gaz et d’huiles de schistes confère également une marge de manœuvre assez importante aux banques centrales des différents pays, et en particulier américaine : si, d’ordinaire, faire marcher la planche à billet en dollar provoque mécaniquement une hausse du pétrole, et donc de l’inflation importée, la découverte de ces réserves freine considérablement la hausse des prix de l’énergie pétrolière. Cette situation permet aux banques centrales d’abreuver l’économie et les marchés en liquidité, sans risques inflationnistes à court terme au moins ! C’est historique, et une très bonne nouvelle dans une situation où la plupart des États des pays développés risquent de voir se tarir le financement de leur dette.

 


L’Europe: inversion de risques et récession

L’Europe, encore et toujours, reste le parent pauvre de la croissance mondiale en recouvrance : elle devrait entrer officiellement en récession cette année. Le niveau de la croissance ou de la récession européenne va être décisif pour les finances publiques des États, en particulier en France. Mais avec une monnaie surévaluée, dont la pérennité a été assurée par Mario Draghi à la tête de la BCE, des politiques de restrictions budgétaires et de hausses d’impôts généralisées sur toute la zone (même l’Allemagne s’apprête à entrer dans le cycle de l’austérité !), force est de reconnaître qu’il y a peu de chance d’avoir une bonne surprise concernant la croissance européenne.

Pourtant, une modification importante a été apportée par les décisions de Mario Draghi : si les emprunts italiens, et espagnols sont devenus attrayant (dans la mesure où la BCE pourra intervenir sans limite éviter un défaut de ces pays) et à un taux attractif, ce sont au contraire les taux d’emprunt exagérément bas de l’Allemagne, de la France, etc, qui devraient partir progressivement à la hausse. Surtout si la « normalisation » de la situation se confirme dans l’année qui vient. Les actifs refuges des années 2010/2012 pourraient bien commencer de s’avérer explosifs en 2013…

Tout va reposer sur la croissance européenne, en particulier française, cette année : en cas de mauvaise surprise, nous risquons de nous apercevoir que le plan de Mario Draghi pourrait ne pas avoir de réalité au-delà de son annonce ?

C’est pourquoi nous demeurons sous-pondérés sur la zone euro, à l’exception de quelques positions sur les banques européennes et les obligations d’État et d’entreprises des pays du sud.

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